La vie épouse le cycle naturel de la femme. Autrefois, les algues (agayaq) tenaient lieu de serviettes sanitaires, et l’on appliquait du sable chaud sur l’abdomen pour faire venir les règles. Le sable chaud et les pierres chauffées servaient aussi à prévenir une fausse-couche au troisième mois de la grossesse ; employé plus tard, ce procédé s’avérait cependant dangereux.
On dit que pour avoir un accouchement rapide et sûr, la femme enceinte doit se lever tôt, sortir dès son réveil et ne pas dormir pendant la journée. Elle doit par ailleurs éviter de s’arrêter sur le seuil de la porte ou de regarder dehors par la porte ; enfin, elle ne doit jamais uriner ou déféquer à l’intérieur. Pour aider la mère pendant l’accouchement, on appelle une sage-femme. Ce sont des femmes dont on dit qu’elles sont « formées à leur tâche en assistant dès l’enfance aux accouchements où elles reçoivent des enseignements précis ». Lorsque les contractions se prolongent, le dos et les côtés de la mère sont appuyés sur un support, et elle s’agrippe à des cordes. Si cela continue pendant quelques jours, on demande à un adulte de faire deux fois le tour de la tente en courant aussi vite qu’il le peut pour inciter le bébé à suivre son exemple. Si cela ne produit pas de résultat, on nomme l’enfant du nom d’une personne que l’on connaît et l’on appelle le bébé par ce nom jusqu’à ce qu’il réponde en naissant.
Au moment de l’accouchement, la mère s’agenouille et se penche vers l’avant, s’agrippant à deux bâtons plantés dans le sol. Un morceau de bois plat et enveloppé de tissu est placé sous elle à la base de la colonne vertébrale. La sage-femme se tient derrière la mère, un genou sur la planche ; elle allonge les bras jusque sous la poitrine de la mère qu’elle soulève un peu. Une autre personne met ses doigts dans la bouche de la mère pour la faire tousser, ce qui aide à pousser l’enfant. Pour ne pas embarrasser la mère, on couvre son vagin. Si le bébé a du mal à sortir de l’utérus, un spécialiste (autre que la sage-femme) se lave les mains dans l’huile de phoque et aide l’enfant à naître. Comme le disait une femme : « L’accouchement est parfois si douloureux que la mère oublie qu’elle est en train de donner la vie. Mais dès que le bébé est né, l’amour se répand partout. »
On dispose une peau d’animal sur laquelle le bébé est déposé à la naissance. Le cordon ombilical est attaché près du ventre et coupé avec un os ; cependant, si le liquide amniotique ne s’épanche pas, le cordon ombilical est d’abord attaché autour du genou de la mère, puis on le tend doucement. On s’empresse de couvrir l’ombilic de l’enfant avec de la mousse brûlée ou un mélange d’aigrettes (suputik) et de charbon pour en accélérer la guérison.
« La première fois qu’on soulève l’enfant, on doit toujours le prendre par la main droite, nous dit-on, pour qu’il ne soit pas gaucher et puisse toujours bien travailler. » Si l’enfant ne pleure pas de lui-même, on lui tape les fesses ; s’il respire mal, on aspire les sécrétions de son nez et de sa bouche. On peut aussi se servir du lait de la mère pour rincer les narines bloquées d’un bébé. On le lave ensuite et, si possible, on lui donne un tout petit bout de viande à manger pour qu’il soit fort. Les jumeaux sont attachés ensemble à la taille ce qui les fera vivre très vieux, selon la croyance. On enterre le placenta dans un trou profond, que les chiens ne peuvent atteindre, car ils pourraient acquérir en le mangeant le goût de la chair humaine.
Si la mère continue à saigner, on place des herbes longues (iidgak) en partie dans le vagin et on lui donne à boire de l’eau chaude ou du thé pour lui redonner des forces.